Pour décourager le piratage audiovisuel, la Hadopi pointe ses défauts

Pour décourager le piratage audiovisuel, la Hadopi pointe ses défauts
Culture et droits d'auteur

Changement de ton du coté de la Hadopi ! Bien loin des publicités anxiogènes et culpabilisantes, l’autorité a lancé, mi-décembre 2020, une nouvelle campagne de sensibilisation au piratage audiovisuel. L’angle d’attaque est nouveau : il compare les désagréments des sites pirates au confort des offres légales. Mais l’ensemble est sans doute trop lisse pour convaincre, dans un contexte où le piratage a baissé, en 2020, essentiellement grâce à… une mise à jour de Google. Explications.

Toujours dans l’attente de sa fusion avec le CSA pour former l’ARCOM (Autorité de Régulation de la Communication Audiovisuelle Numérique), suite au report de la très attendue « Loi Audiovisuel », la Hadopi (Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet) poursuit toutefois sa mission de défense des contenus protégés par le droit d’auteur.

Dans sa nouvelle campagne sur le piratage audiovisuel, la Hadopi privilégie « une communication positive »

Depuis la mi-décembre 2020, elle a lancé une nouvelle campagne de communication pour sensibiliser au piratage, en collaboration avec le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée). Loin des canons anxiogènes et culpabilisants de nombreuses publicités de ce type, l’autorité veut, cette fois, « privilégier une communication positive ».

La campagne, nommée « On a tous de bonnes raisons d’arrêter de pirater », appuie sur les désagréments qui accompagnent l’utilisation d’une offre audiovisuelle pirate, par comparaison avec une offre légale. La Hadopi et le CNC expliquent qu’ils ont « souhaité prendre le parti de l’expérience des utilisateurs et tourner en dérision les principaux inconvénients attribués à la consommation illégale de contenus ».

Des clips avec des figures de la culture YouTube et Instragram

Pour cela, les deux partenaires ont fait appel à trois porte-paroles, issus de la culture Internet et YouTube, pour trois clips qui se veulent drôles et percutants. Anis Rhali, de Golden Moustache, l’humoriste instagrameur Just Riadh et la chanteuse-YouTubeuse Lola Dubini y racontent leurs mésaventures avec des contenus piratés (films ou musiques).

La cible est clairement les moins de 30 ans. Le but est de s’adresser aux plus jeunes, en utilisant les codes d’une culture qu’ils maîtrisent sur le bout des doigts. Comme souvent avec ce genre d’hybridation, le résultat est un brin bancal. Les clips ressemblent certes à des vidéos YouTube, mais supervisées par un réalisateur d’une cinquantaine d’années issu de la télévision. Le discours semble un peu forcé.

Un ensemble louable, mais trop poussif

Une série d’affiches complète le dispositif, mettant elles aussi en avant les défauts des contenus piratés. La campagne se veut ainsi « en prise avec les usages » et ambitionne de « valoriser l’expérience de qualité proposée par les plateformes légales ».

L’objectif est plutôt louable, mais l’ensemble semble bien poussif. Les arguments sont valables : la meilleure fiabilité et qualité des offres légales sont bien l’un des facteurs essentiels qui poussent à renoncer au piratage. Mais c’est une démarche que la plupart des utilisateurs font seuls. Peu de chances qu’une campagne aussi lisse ait la moindre chance de faire bouger un pirate assidu.

Pourtant, le piratage audiovisuel a régressé en 2020…

Pour atteindre de tels objectifs, réduire la visibilité et l’accessibilité des sites pirate demeure ainsi la méthode la plus efficace, surtout associée à une offre légale lisible et de qualité. Ainsi, au niveau mondial, malgré les différents confinements, les accès à des sites de piratage a régressé en 2020.

Selon l’analyse du cabinet MUSO, les accès directs à des sites de piratage (sans passer par des moteurs de recherche) a baissé de 10% entre décembre 2019 (entre 250 et 300 millions de visites par jour dans le monde) et novembre 2020 (entre 230 et 275 millions de visites).

Sur les accès via des moteurs de recherche, la baisse est encore plus nette, de près de 20%, entre décembre 2019 (entre 125 et 150 millions de visites) et novembre 2020 (110 millions de visites).

… grâce à une mise à jour de l’algorithme de Google !

Si les abonnements à des offres légales pour faire face aux confinements peut expliquer une partie de ce phénomène, le cabinet MUSO estime qu’il provient essentiellement de deux modifications de l’algorithme de Google, l’une déployée en janvier 2020, l’autre en mai 2020. Ces deux dates correspondent en effet aux baisses les plus prononcées des accès aux sites illégaux.

Ces deux mises à jour visaient notamment à réduire la présence de ces sites pirate dans les résultats de recherche. Comme une preuve éclatante de l’efficacité de ces techniques pour assécher l’offre illégale…