Loi anti-haine sur Internet : le Sénat retoque deux mesures critiquées

Loi anti-haine sur Internet : le Sénat retoque deux mesures critiquées
Réglementaire

Après avoir été adoptée par l’Assemblée, la loi contre la haine sur Internet a subi une profonde contestation de la part du Sénat. La Commission des lois a remis en cause les mesures les plus contestées du texte, à savoir le délai d’action très court des plate-formes, et la remise en ligne d’un contenu interdit. Elle les juge contraires au droit européen.

La contestation contre la loi anti-haine sur Internet s’étend au pouvoir législatif. Déjà critiquées par la Commission Européenne, le Conseil National du Numérique ou des associations comme la Quadrature du Net, deux mesures risquent d’être retirées de la loi. C’est du moins l’avis de la Commission des Lois du Sénat, que la chambre suit en général.

Effets pervers de la loi anti-haine

La première mesure en question est le délai d’action de 24 heures pour retirer un contenu jugé haineux, assorti d’une menace de sanctions très lourdes si la plate-forme n’obtempère pas à temps. La seconde est la réaction face à la republication d’un contenu haineux déjà censuré.

Pour les sénateurs, le texte « est encore juridiquement très inabouti à ce stade », sa rédaction est « déséquilibrée et ne manquera pas d’entraîner de nombreux effets pervers », comme la sur-censure des plate-formes ou un possible détournement de la loi pour remettre en cause la liberté d’expression.

En outre, le délai très court risque de pénaliser la lutte contre les contenus encore plus sensibles, notamment les messages à caractère terroriste ou pédopornographique, et empêcher leur suppression immédiate.

Contraire au droit européen et inapplicable juridiquement

En outre, le texte est, en l’état, contraire au droit européen, et il ne manquerait pas, en cas de contestation, d’être annulé par la Cour de Justice de l’Union Européenne. Enfin, la mise en œuvre des sanctions prévues par la loi n’a pas été précisé, la plongeant dans un flou juridique qui risque de la rendre inapplicable. Comment, notamment, prouver en 24 heures l’intentionnalité ou l’imputabilité des faits ?

Le principe de la loi n’est pas remis en cause, mais elle doit être profondément remaniée. Les sénateurs vont désormais l’analyser en séance plénière, et l’amender. Elle passera ensuite devant une commission paritaire mixte, composée de députés et de sénateurs. Si les parlementaires réussissent à lui donner plus de robustesse, la loi pourra être promulguée.