Navigateurs Internet : comment Google a sciemment saboté Firefox !

Navigateurs Internet : comment Google a sciemment saboté Firefox !
Innovation

Une pierre de plus dans le jardin de Google : la multinationale vient d’être accusée par un ancien cadre de Mozilla, d’avoir, pendant des années, savonné la planche de Firefox. L’objectif était de multiplier les petits dysfonctionnements sur des sites Internet, afin de dissuader les internautes d’utiliser le navigateur open source. Et de pousser Chrome en avant. Dans cette guerre des navigateurs, il faut, plus que jamais, sauver le soldat Firefox !

L’histoire de la technologie est remplie d’histoire de ce type. Comment un produit bien meilleur se retrouve vaincu et ostracisé par un concurrent plus malin et plus doué commercialement. Mais, dans le cas de Chrome et de Firefox, la dramaturgie est accentuée par le fait que les deux entreprises mères (Mozilla et Google) étaient à l’origine partenaire de recherche. Et que Firefox a toujours été du coté de l’open source, du logiciel libre, de la défense de la vie privée.

Quand Google torpille Firefox

Aujourd’hui, l’opinion publique commence à comprendre que, sous couvert d’être efficace et « cool », Google a instauré un monopole, à la fois terriblement violent pour ses concurrents et sans tendresse dans le traitement des données personnelles des internautes. A chaque nouvelle révélation des magouilles du géant du net, son image en prend un sérieux coup. Mais sans briser (pour l’heure) son hégémonie sur les moteurs de recherche et les navigateurs web.

La fable du renard roux et du Chrome illustre à merveille cette politique foncièrement déloyale de Google. Jonathan Nightingale, ancien directeur général et vice-président de Firefox chez Mozilla, sort la sulfateuse pour évoquer le plan sciemment mis en place par Google afin de réduire au maximum l’audience de Firefox. Une technique imparable : truffer les sites et contenus possédés par Google (terriblement populaires !) de petits bugs spécialement destinés aux utilisateurs de Firefox. Le tout en continuant de travailler, du moins officiellement, main dans la main avec l’équipe de Mozilla ! Une rouerie assez impressionnante.

Avant Chrome, tout Google était fan du petit renard

« Quand j’ai commencé chez Mozilla en 2007, il n’y avait pas de Google Chrome », expose Nightingale, qui rappelle qu’à cette époque, tous les salariés de Google étaient des fans de Firefox, et utilisaient le navigateur. Il a d’ailleurs inspiré la création de Chrome.

A la sortie du navigateur de Google, rien n’a changé, du moins en apparence : « Ils avaient désormais un produit concurrent, mais ils n’ont pas coupé les liens, n’ont pas rompu notre accord de recherche – rien de tout cela. En fait, l’histoire que nous n’arrêtions pas d’entendre était la suivante : ‘Nous sommes du même côté. Nous voulons les mêmes choses’. Je pense que nos amis de Google le croyaient vraiment. Au niveau individuel, leurs ingénieurs avaient les mêmes préoccupations que nous. Et nous avons appris de nos expériences respectives, ensemble », raconte Nightingale.

« Oups. C’était accidentel. On le réparera dans deux semaines. »

Le seul soucis, c’est que la direction de Google n’était pas du tout sur cette longueur d’onde. Progressivement, des « petits » bugs sont apparus. Quand un internaute cherchait « Firefox » avec Google, le moteur de recherche lui proposait systématiquement des publicités pour Chrome. Gmail et Google Docs ont commencé à connaître des problèmes de performances et des bugs uniquement sous Firefox. Des versions de démonstration d’autres sites possédés par Google indiquaient que le navigateur de Mozilla était « incompatible ».

« Tout ça, ce sont des choses qu’on a le droit de faire pour être compétitif, bien sûr. Mais nous étions toujours partenaire de recherche, alors on se disait : « Hé, qu’est-ce qui se passe ? Et à chaque fois, ils disaient : ‘Oups. C’était accidentel. On le réparera dans deux semaines’. Encore et encore. Oups. Un autre accident. On va arranger ça bientôt. Nous voulons les mêmes choses. On est dans la même équipe. Il y avait des douzaines de ‘oops’. Des centaines peut-être même » accuse Nightingale.

«  Je ne crois pas que Google soit incompétent à ce point »

« Je ne suis pas du genre à attribuer à la malice ce qui peut s’expliquer par de l’incompétence, mais je ne crois pas que Google soit incompétent à ce point. On perdait des utilisateurs à chaque fois » poursuite l’ancien cadre de Mozilla. Pire encore : à chaque couteau planté dans le dos, les ingénieurs devaient travailler d’arrache-pied pour résoudre les bugs, au lieu d’améliorer Firefox.

L’équipe de Mozilla a mis beaucoup de temps à prendre conscience que Google les trompait depuis le début. Dès qu’ils ont compris qu’il s’agissait d’une vraie guerre commerciale en bonne et due forme, et que le partenariat n’était qu’un grossier faux nez, les dégâts étaient déjà considérables.

Firefox et YouTube : comment transformer en lièvre en tortue

Cette histoire en rappelle d’autre. En 2018, Chris Peterson, responsable du programme Mozilla, avait déjà accusé Google de ralentir volontairement YouTube pour Firefox. Constatant que le navigateur de Mozilla était plus performant que Chrome pour charger les pages YouTube, Google a tout simplement modifié le code source de la plateforme de vidéo (propriété de Google).

Le géant du net a ajouté une bibliothèque JavaScript que ne supportait pas Firefox. Rendant le chargement de YouTube sous Firefox cinq fois plus lent que sur Chrome.

Vous pouvez faire changer les choses !

Une magnifique illustration du risque que représente une position trop dominante sur un secteur de l’économie. Oui, Google doit être régulé. Et oui, Firefox doit être, plus que jamais, soutenu. Ses performances sont aujourd’hui inférieure à celle de Chrome sur quelques sites? C’est uniquement à cause de Google. Et il protège réellement votre vie privée. Vous la voulez vraiment aux mains de Google ?

Les internautes ont du pouvoir, en la matière. Il consiste, tout simplement, à changer de navigateur.

https://www.mozilla.org/fr/firefox/

C’est simple comme un petit clic.